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Igor Strawinsky, Paris, Juin 1929, © Boris Lipnitzki/Roger-Viollet - Une photo citée du site ParisEnImage - Cliquer sur la photo pour l'original et ses références
Recto de la pochette des disques 33 tours Decca LXT/SXL 6230
Ernest ANSERMET, cliquer pour une vue agrandie
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Recto de la pochette des disques 33 tours Decca LXT/SXL 6230

C'est à la demande de Diaghilev que Strawinski composa «Pulcinella» - le nom italien de Polichinelle - entre 1919 et 1920. Ce ballet néo-classique sur un scénario de «commedia dell'arte» est une sorte d'arrangement de musique de Pergolèse, ou du moins attribuée à ce compositeur. En fait, Strawinski a emprunté aussi bien à Pergolese qu'à d'autres compositeurs italiens: les sonates en trio de Domenico Gallo, la suite de clavecin de Carlo Ignazio Monza, les «concerti armonici» de Unico Wilhelm van Wassenaer (alors faussement attribués à Pergolèse) et un recueil d'airs antiques édités en 1885 par Alessandro Parisotti. La majorité des pièces proviennent toutefois bien des oeuvres de Pergolese, des extraits de ses «commedie in musica», «Il flaminio et Lo frate ' nnamorato», de sa cantate «Luce degli occhi miei» et de sa «Sinfonia per violoncello e continuo». Le verso du disque d'Ernest Ansermet donne l'origine exacte de chaque pièce:


Pierre Boulez sur ce qui caractérise Pulcinella par rapport aux autres oeuvres de Strawinski:

"[...] Pulcinella est une tout autre affaire, parce que Pulcinella est un jeu. OEdipus rex n’est pas un jeu; Apollon musagète n’est pas un jeu. [...] Stravinsky a pris des pièces sans grande valeur – des oeuvres dont on ne se souviendrait pas si on les regardait une seule fois – et les a traitées de manière très originale. C’est comme un vieux monument qu’on repeint de couleurs très vives, si bien qu’on ne voit pas l’histoire, on voit les couleurs. Pulcinella est une oeuvre que j’aime diriger, parce que c’est comme un jouet entre les mains. [...]" cité du texte publié dans le CD CSO Resound, avec Pierre Boulez dirigeant l'Orchestre de Chicago.

La version initiale a été écrite pour trois voix et un orchestre réduit de 32 instrumentistes. Elle fut donnée en première audition à l'Opéra de Paris le 15 mai 1920 par les Ballets russes, sur une chorégraphie de Léonide Massine, sous la direction musicale d' Ernest ANSERMET, avec des décors de Pablo Picasso. Une suite en a été tirée en 1922 (que Strawinski réécrira en 1949). Elle place les parties vocales dans l'orchestre et réduit la partition à onze pièces. Le 24 février 1923, Ernest ANSERMET en donna la première audition à Genève:


Les propos d'Ernest Ansermet sur Pergolese et Strawinski - publiés dans la brochure-programme de ce concert, dont est également citée la photo ci-dessus - sont très intéressants:

"[...] La manière dont ces deux personnalités musicales se trouvent collaborer dans Pulcinella est assez singulière pour appeler quelques commentaires. Dans les années 1917-1920, les Ballets russes avaient eu l’idée, pour leurs nouveaux spectacles, de s’inspirer de certains anciens compositeurs italiens, Domenico Scarlatti, Pergolesi, Cimarosa et Rossini. Tommasini pour Scarlatti (les Femmes de bonne humeur), Respighi pour Cimarosa (Astuzie feminili) et pour Rossini (Boutique fantasque) se contentèrent d’apprêter pour le ballet ou l'opéra-ballet, et de transcrire quand il y avait lieu, les oeuvres choisies de ces maîtres. Il en alla un peu autrement avec Pergolesi: Strawinsky, chargé de préparer la musique, s'éprit à ce point de son sujet, qu’il dépassa les limites d’une transcription, et sur un certain nombre de pages du vieux maître, prises comme point de départ, élabora une oeuvre qu’on peut considérer comme originale.

La vie et l’oeuvre de Pergolesi sont d’ailleurs bien faits pour enflammer l’imagination: la vie, si courte et si remplie, touchant à la fois au couvent et au théâtre et toute pénétrée de la folle ambiance napolitaine, garde un certain mystère et fait de Pergolesi un personnage presque fabuleux. L’oeuvre, relativement abondant, et dont on n’avait guère retenu que le fameux Stabat mater et la Serva padrona, est d’une originalité singulière (souvent trahie dans les éditions modernes) et réserve au chercheur encore bien des pages extrêmement curieuses. Strawinsky vit en Pergolesi un proche parent des vieux musiciens russes qu’il affectionnait, en ce sens qu'il ne lui paraissait pas de ces artistes — comme les Florentins, les Vénitiens, les grands Allemands — rattachés directement et comme de naissance à un art noble ou savant, mais de ceux au contraire, qui, nés au sein d’une musique populaire, font surgir tout à coup de cette musique populaire même, spontanée et sauvage, une oeuvre de grand style. Autrement dit, ce que Strawinsky vit d’abord en Pergolesi, ce fut le Napolitain, — la qualité de la musique napolitaine devenue flagrante dans une oeuvre de style — et ce qu’il y vit encore, ce fut le XVIIIe siècle à son aurore, un XVIIIe siècle tout frais, encore acide, presque agressif.

Dans un cas semblable, un peintre eût fait, de son modèle, une «copie». N’est-ce pas alors que le musicien, lui, fait un «portrait», c’est-à-dire une oeuvre qui sans cesse trahit l'auteur bien que tous ses éléments fussent empruntés au sujet? Pulcinella, en somme, c’est donc un portrait de Pergolesi par Strawinsky. Strawinsky emprunte à Pergolesi non seulement ses mélodies, mais leurs caractères harmoniques, et aussi ses caractères de style, et ce qu’on appelle la «forme» des morceaux; et il en poursuit l’achèvement comme il lui semble que Pergolesi eût fait à sa place, c’est-à-dire avec un certain recul. La forme inachevée — inhérente à l’époque — de beaucoup de manuscrits que Strawinsky avait en mains, l’encourageait d’ailleurs dans cette voie. Sur la musique ainsi élaborée, le chorégraphe Massine composa un ballet répondant, d’autre part , à un livret emprunté au théâtre populaire napolitain du début du XVIIIe siècle, et tournant autour de la figure traditionnelle de Pulcinella. Mais ce livret est sans aucune importance pour l’audition de la musique.

Cette oeuvre, écrite «d’après Pergolesi», et dont les fragments exécutés aujourd’hui constituent environ la moitié, est d’une importance assez grande dans l’évolution récente de Strawinsky. Elle a contribué à élargir sa langue musicale, en appliquant son imagination à des éléments musicaux qui n’avaient plus rien de «russe»; elle a contribué aussi à le ramener à une musique tonale sans que la tonalité soit pour elle une contrainte, ni un tuteur. Elle l’a ramené enfin à l’orchestre, cette sorte d’orchestre que M. Roland Manuel a appelé une «assemblée d’hommes libres» et qui, dans le cas particulier, est composé comme suit: un quintette à cordes solo; quintette à cordes ripieni; deux flûtes, deux hautbois, deux bassons, deux cors, une trompette, un trombone.
E.A. [...]"

Le 2 octobre de la même année, lors d'un festival de gala des Ballets Russes, il dirigea ensuite le ballet complet:


Du 2 au 4 novembre 1965 Ernest ANSERMET enregistra cette oeuvre pour Decca, bien entendu dans le Victoria-Hall de Genève. Elle paraît en juillet 1966 sur les disques Decca LXT resp. SXL 6230 (mono resp. stéréo) et en mai 1967 sur les disques Decca LONDON 5978 et OS 5978 (ref. pour ces diverses données discographiques: l'excellent travail de Philip Stuart, voir par exemple cette page, plus particulièrement «le fichier Switzerland»).

Les textes chantés et leur traduction:

MENTRE L’ERBETTA
Tenor
Mentre l’erbetta                  Pendant que l’agnelle
pasce l’agnella,                  paît dans l’herbe,
sola, soletta                     seule, si seule,
la pastorella                     la bergère,
tra fresche frasche               à travers la forêt
per la foresta                    et les frais bocages,
cantando va.                      va chantant.

CONTENTO FORSE VIVERE
Mezzo-Soprano
Contento forse vivere             Je pourrais peut-être vivre heureux
nel mio martir potrei,            dans mon tourment
se mai potessi credere            si jamais je pouvais croire que,
che, ancor lontan, tu sei         si loin que tu sois, tu serais
fedele all’amor mio,              fidèle à mon amour,
fedele a questo cor.              fidèle à ce coeur.

CON QUESTE PAROLINE
Bass
Con queste paroline               Avec ces petits mots
così saporitine                   si doux,
il cor voi mi scippate            vous m’arrachez le coeur
dalla profondità.                 au plus profond.
Bella, restate qua,               Ma belle, restez ici,
che se più dite appresso          et si vous parlez encore
io certo morirò.                  je mourrai certainement.
Così saporitine                   Avec ces petits mots
con queste paroline               si doux,
il cor voi mi scippate,           vous m’arrachez le coeur
morirò, morirò.                   au plus profond.
Sento dire no’ncè pace            Je mourrai, je mourrai.
Trio: Mezzo-Soprano, Tenor, Bass
Sento dire no’ncè pace,           J’entends dire qu’il n’y a pas de paix,
sento dire no’ncè cor,            j’entends dire qu’il n’y a pas de coeur;
ma cchiù pe’tte, no, no,          pour toi, hélas, non, jamais,
no’ncè carma cchiù pe’tte.        il n’y a plus de paix pour toi.
CHI DISSE CÀ LA FEMMENA
Tenor
Chi disse cà la femmena           Qui dit que la femme
sa cchiù de farfariello           est plus rusée que le diable
disse la verità, disse la verità. dit la vérité, la vérité.

NCÈ STA QUACCUNA PO’
Duet
Mezzo-Soprano
Ncè sta quaccuna po’              Il y a des femmes
che a nullo vole bene             qui ne veulent du bien à personne
e a cciento ’nfrisco tene         et qui en tiennent cent sur un fil,
schitto pe’ scorcoglia’,          les dupant tous ouvertement,
e a tant’ autre malizie           et qui ont tant de tours,
e a tant’ autre malizie           tant de tours,
chi maie le ppo’, le ppo’ conta’. que personne ne pourrait jamais les compter.
Tenor
Una te fa la ’nzemprece           Il y a celles qui feignent l’innocence,
ed è malezeosa,                   et qui sont pourtant rusées;
’n autra fa la schefosa           d’autres agissent hautainement,
e bo’ lo maretiello.              et veulent pourtant attraper un mari.
Chi a chillo tene ’ncore          D’autres encore s’agrippent à un homme,
e a tant’ autre malizie           et ont pourtant tant de tours
chi maie le ppo’, le ppo’ conta’  que personne ne pourrait les compter.
e lo sta a rrepassa’?             Qui pourrait jamais les compter tous ?

UNA TE FA LA ’NZEMPRECE
Tenor
Una te fa la ’nzemprece           Il y a celles qui feignent l’innocence,
ed è malezeosa                    et qui sont pourtant rusées ;
’n autra fa la schefosa           d’autres agissent hautainement,
e bo’ lo maretiello,              et veulent pourtant attraper un mari.
ncè sta quaccuno po’              Il y en a aussi certaines
che a nullo—udetene—              qui n’aiment personne – écoutez-moi –,
chi a chillo tene ’ncore          qui s’agrippent à un homme
e a cchisto fegne amore           et font pourtant les yeux doux à un autre,
e a cciento n’frisco tene         et en tiennent cent sur un fil,
schitto pe’ scorcoglia’,          les dupant tous ouvertement,
e tante, tant’ autre malizie      et qui ont tant et tant de tours
chi maie le ppo’ conta’.          que personne ne pourrait les compter.

SE TU M’AMI
Mezzo-Soprano
Se tu m’ami, se tu sospiri        Si tu m’aimes, si tu soupires
sol per me, gentil pastor,        après moi seule, doux berger,
ho dolor de’ tuoi martiri,        je souffre de ton tourment.
ho diletto del tuo amor,          j’ai plaisir à ton amour.
ma se pensi che soletto           Mais si tu penses qu’en retour
io ti debba riamar,               je dois t’aimer toi seul,
pastorello, sei soggetto          pastoureau, tu risques fort
facilmente a t’ingannar.          de te tromper.
Bella rose porporina              Aujourd’hui Silvia choisit
oggi Silvia sceglierà,            une belle rose pourpre,
con la scusa della spina          mais demain elle la dédaignera
doman poi la sprezzerà.           sous prétexte de ses épines.
Ma degli uomini il consiglio      Mais moi,
io per me non seguirò.            je ne suivrai pas les conseils des hommes:
Non perchè mi piace il giglio     ce n’est pas parce que j’aime le lys
gli altri fiori sprezzerò.        que je dédaignerai les autres fleurs.

PUPILLETTE, FIAMMETTE D’AMORE
Trio: Bass, Tenor, Mezzo-Soprano
Pupillette, fiammette d’amore,    Petites pupilles, flammèches d’amour,
per voi il core struggendo si va. pour vous mon coeur languit


La superbe série d'émissions de François HUDRY «Ernest Ansermet et l'OSR - l'histoire d'une folle aventure», réalisée par Gérald Hiestand et diffusée sur Espace 2 du 13 au 24 avril 2018, était consacrée aux enregistrements marquants qu' Ernest Ansermet a réalisé pour le disque (les indicatifs du début et de la fin de chaque volet de la série sont des courts extraits d'oeuvres d'Igor Strawinski, de la «Danse» de ses «Quatre études» et du «Galop» de sa «Suite no 2»).

Les 2e et 3e épisodes étaient entièrement consacrés à des oeuvres d'Igor Strawinski, l'un des compositeurs les plus importants dans l'oeuvre d' Ernest Ansermet.

Dans le 2e épisode venait - après le « Le Chant du Rossignol» et la «Suite de l'Oiseau de Feu, version 1919» - cet enregistrement de «Pulcinella».

Igor STRAWINSKI, Pulcinella, Orchestre de la Suisse Romande, Marilyn TYLER (S), Carlo FRANZINI (T), Boris CARMELI (B),Ernest ANSERMET, 2-4 novembre 1965, Victoria-Hall, Decca


Cliquer sur la flèche - resp. le pictogramme pause - à gauche pour démarrer - resp. arrêter - l'écoute, saisir le curseur avec la souris et le positionner au minutage désiré pour écouter / réécouter le document à partir d'un endroit donné.
(Il s'agit d'un mp3 128kb, comme d'habitude dans les archives proposées à l'écoute en ligne par la Radio Télévision Suisse)

Pour Pulcinella, le minutage sur le début de la présentation de François Hudry est 47 minutes 17 secondes.

Les minutages sur le début de chaque tableau son donnés ci-dessous, en minutes:secondes, ils permettent de mieux se situer dans l'oeuvre pendant l'écoute:

  49:01 Sinfonia - Ouverture
  50:50 1er tableau - Serenata: "Mentre l'erbetta"
        Scherzino
        Allegro
        Andantino
  59:17 2e tableau - Allegro, Allegretto
        Ancora poco mono "Contento forse vivere"
        Allegro assai
1:03:58 3e tableau - Allegro — Alla breve "Con queste paroline"
1:06:10 4e tableau - Andante "Sento dire no'ncô pace"
        Allegro - Presto - Larghetto - Allegro alla breve
        Tarantella
1:14:12 5e tableau - Andantino "Se tu m'ami"
        Toccata
        Allegro
1:17:41 6e tableau - Gavotta con due variazioni
1:21:40 7e tableau - Vivo
1:23:12 8e tableau - Tempo di minuetto "Pupillette, fiammette d'amore"
        Finale - Allegro assai

Je ne peux pas encore vous proposer cet enregistrement en téléchargement - et en meilleure résolution audio... - le droit d'auteur d'Igor Strawinski s'étendant jusqu'à fin 2041. Donc rendez-vous en 2042, en espérant d'être encore de ce monde - je touche du bois...

                                                            **********

Le sommaire de ce second épisode de la série d'émissions de François Hudry, avec les minutages sur les débuts de chaque séquence:

Un court extrait du «Capriccio pour piano et orchestre» est d'abord présenté, avec Igor Strawinski au piano, l'Orchestre des Concerts Straram étant dirigé par Ernest Ansermet (Lys)

04:06 Igor Strawinski, «Le Chant du Rossignol», Orchestre de la Suisse Romande, Ernest Ansermet, mai 1956, Decca

27:03 Igor Strawinski, «Suite de L'Oiseau de feu (1919)», Orchestre de la Suisse Romande, Ernest Ansermet, octobre 1950, Decca

47:17 Igor Strawinski, «Pulcinella», Marylin Tyler, Carlo Franzini, Boris Carmeli, Orchestre de la Suisse Romande, Ernest Ansermet, 2 au 4 novembre 1965, Victoria-Hall, Decca