Franz LISZT
Concerto pour piano et orchestre No 1, S 124
Arturo BENEDETTI MICHELANGELI
Orchestre de la Suisse Romande
Ernest ANSERMET
8 juillet 1939, Concert des lauréats
1er Concours International de Musique de Genève
Bien que le concerto pour piano no 1 ne fut donné en première audition à Weimar qu'en 1855 sous la direction de Berlioz et avec le compositeur au piano, et publié l'année suivante - durant la période weimarienne de Liszt -, sa gestation est de beaucoup antérieure et remonte à 1832, peu avant le concerto nommé «Malédiction» (S 121).
L'oeuvre fut d'abord conçue comme une pièce de virtuosité de grande dimension suivant de près le cadre rigide d'un concerto de Beethoven: "[...] Les trois mouvements suivent la succession de Beethoven mi bémol majeur, mi majeur, mi bémol majeur (qui, à son tour, renvoie au schéma tonal de la sonate pour piano Hob XVI.52 de Haydn, sa dernière, également en mi bémol majeur). Liszt révisera cependant sa composition à maintes reprises avant de se sentir prêt à la publier. Il la raccourcit du tiers, refreina certains passages purement virtuoses et renforça sa forme symphonique. La version finale se compose de quatre mouvements courts clairement définis et joués sans interruption. [...]" Michael Emmans Dean, référencié plus bas.
Franz Liszt y fait transparaître son tempérament de poète et de coloriste: dans les diverses variations thématiques éclatent la richesse d'imagination et l'adresse prodigieuse de son talent d'orchestrateur. Tout en laissant la prime place à la sonorité et à la virtuosité délicate du piano, Franz Liszt a soin de donner une valeur considérable aux répliques de l'orchestre:
"[...] Le schéma de l’ouverture au ton déclamatoire qui inclut soliste et orchestre complet immédiatement suivie d’une quasi-cadence virtuose est certes connu mais il cède ici la place à des passages développés dans lesquels, par exemple, seule une clarinette ou deux premiers violons accompagnent le piano. Une telle instrumentation chambriste anticipe les expériences orchestrales de Mahler et de Schoenberg quelque cinquante ans plus tard et établit un contraste prononcé avec les textures lourdes de ses contemporains allemands tels Schumann, Wagner et Brahms.
Le second mouvement, Quasi adagio, est en mi majeur et fait d’abord entendre les cordes avec sourdines jouant une cantilène en 12/8 avant que le piano ne se joigne à l’orchestre. Liszt choisit d’ajouter un scherzo symphonique en mi bémol aux trois mouvements originaux. Cet Allegretto vivace allait bientôt devenir célèbre grâce au triangle qui fait partie intégrante de la structure motivique, une inspiration beethovénienne considérée par les contemporains de Liszt comme une faute de goût. L’Allegro marziale animato conclusif transforme le thème du mouvement lent en marche conférant un poids symphonique à l’oeuvre toute entière. [...]" Michael Emmans Dean, 2015, traduction de Jean-Pascal Vachon, livret du SACD BIS-2100.
Dans l'interprétation qui vous en est proposée ici, le début du concerto - environ 1 1/2 minutes - manque, mais ce n'est qu'un tout petit défaut, le document reste extrêmement précieux: il nous reporte en été 1939, au Concert des Finalistes du tout premier Concours International de Genève, donné le 8 juillet 1939 au Victoria-Hall sous la direction d'Ernest ANSERMET!
Le 16 juin 1939 paraissait dans le Journal de Geneve en page 6 le bilan de la préparation du premier concours musical de Genève:
"[...] 167 candidats de 21 pays différents se sont inscrits pour le premier Concours international d'exécution musicale, qui aura lieu au Conservatoire de musique de Genève, du 26 juin au 8 juillet.
64 viennent de la Suisse (dont 16 de Genève), 21 d'Italie, 20 de France, 11 d'Allemagne, 7 de Hongrie, 6 d'Angleterre, 5 de Pologne, 5 de Hollande, 4 de Belgique, 4 de Roumanie, 3 des Etats-Unis, 3 de Turquie, 3 de Bohême, 3 de Grèce, 2 de Yougslavie et un concurrent de chacun des pays suivants: Danemark, Lettonie, Russie, Espagne et Uruguay. [...]" (voir aussi cette page du site NotreHistoire.ch
Parmi les finalistes "piano" se trouvaient plusieurs noms restés bien connus:
Extrait du programme du concert des lauréats 1939, pour le programme complet voir cette page du projet onstage, ou cette page du site NotreHistoire.ch.
C'est Arturo BENEDETTI MICHELANGELI qui remporta le premier prix de piano, en compagnie d'autres artistes devenus célèbres:
Extrait du programme du concert des lauréats 1939, pour le programme complet voir cette page du projet onstage, ou cette page du site NotreHistoire.ch.
Albert PAYCHÈRE assistait aux séances du concours. Cité d'un de ses compte-rendus, publié dans le Journal de Genève du 8 juillet en page 7:
"[...] Le concours international d'exécution musicale - La journée des planistes hommes
Journée qu'il faut marquer d'une pierre blanche, car elle nous a révélé un grand pianiste doublé d'un grand artiste.
Lorsque M. Arturo Benedetti-Michelangeli ouvrit le feu, à 10 h. 15 du matin, l'auditoire eut dès les premières mesures le sentiment qu'il allait se passer quelque chose de grand. Cette impression devint de plus en plus forte au fur et à mesure que le jeune pianiste italien avançait dans la Sonate op. 111 de Beethoven.
Magnifique technique, interprétation équilibrée et vivante: tout ce qui satisfait l'esprit, tout ce qui enchante l'âme: la puissance avec la chaleur, l'élan passionné dans les limites du style. Et la clairté. Entendez ici l'effet d'une nature artistique orientée vers la lumière.
Les Variations sur un thème de Paganini, de Brahms en furent la plus admirable démonstration.
Le morceaux imposé pour les pianistes était signé de M. Marescotti, Fantasque. Belle page où la poésie le dispute à l'humour et au pittoresque, et brillamment écrite pour l'instrument.
Le succès de M. Arturo Benedetti-Michelangeli fut triomphal. Le jury a sanctionné le jugement de l'auditoire en accordant le prix et celui-là ne sera pas discuté.
M. Kreml (Suisse) obtient une médaille, de même M. Joseph Weingarten (Hongrie). Excellentes décisions.
Le prix institué pour récompenser le meilleur artiste suisse et délivré par un jury suisse a été attribué à Mlle Lemi Neuenschwander, cantatrice. Et voilà le point final de ce premier Concours nternational d'exécution musicale à Genève.
Ce soir, au Victoria Hall, à 20 h. 15 précises, les lauréats se feront entendre accompagnés par l'Orchestre de Radio Suisse romande renforcé, sous la direction de M. Ernest Ansermet II y aura foule.
A. P. [...]"
Le programme du concert final des lauréats:
Montage d'extraits du programme du concert des lauréats 1939,
pour le programme complet voir cette page du projet onstage.
Ernest ANSERMET en répétition au piano avec le jeune Arturo BENEDETTI MICHELANGELI, 1939 ou 1940? Je n'ai pas encore pu trouver d'informations exactes sur l'origine de ce superbe instantané: si une personne visitant cette page devait en savoir plus, toutes informations m'intéressent -> Vos remarques!
L'enregistrement du concerto de Franz Liszt est présenté ici tel qu'il fut radiodiffusé, sans traitement de ma part, sans filtrage supplémentaire - ce qui n'est hélas pas le cas pour diverses parutions plus ou moins pirates (*) sur CD, hélas bien trop filtrées: il est ici tel que repiqué par la Radio Suisse Romande à partir de ses 78 tours d'origine, gravés en direct. Il y a certes par endroits un ronflement statique un peu trop prononcé, des griffures et autres défauts, mais à part ça l'enregistrement est superbe, vu son âge actuel - 2018 - vénérable, 79 ans!
(*) à ma connaissance, elles ne peuvent provenir que de la même source - une radiodiffusion de la Radio Suisse Romande - car le début manque partout.
Franz Liszt, Concerto pour piano et orchestre No 1 en mi bémol majeur, S 124, Arturo Benedetti Michelangeli, Orchestre de la Suisse Romande, Ernest Ansermet, 8 juillet 1939, Concert des lauréats du 1er Concours International de Musique de Genève
1. Allegro maestoso (*) 03:56 (-> 03:56)
2. Quasi Adagio 04:04 (-> 08:00)
3. Allegretto vivace - Allegro animato (**) 4. Allegro marziale animato 07:23:750 (-> 15:23:750)
(*) le début manque, env 1 1/2 minutes
(**) comme les 3e et 4e mouvements sont quasiment enchaînés - et bien que la séparation entre les deux soit exactement délimitée - j'ai préféré les laisser dans un seul fichier.
Provenance: Radiodiffusion, Archives RSR resp. RTS
que vous pouvez obtenir en...
pour un téléchargement libre, depuis mon site
3 fichiers FLAC, 2 fichiers CUE (*) et 1 fichier PDF dans 1 fichier ZIP
(*) 1 fichier CUE pour les fichiers décomprimés en WAV et 1 fichier CUE pour les fichiers comprimés FLAC, si votre logiciel peut utiliser directement les fichiers FLAC.
Deux émissions sur Arturo BENEDETTI MICHELANGELI peuvent être écoutées par l'intermédiaire des archives de la Radio Télévision Suisse Romande, réalisées par Catherine BUSER dans le cadre de son excellente série d'émissions «Quai des Orfèvres»
La première émission s'intitule «Arturo Benedetti Michelangeli, magicien du clavier»:
Cliquer sur la flèche - resp. le pictogramme pause - à gauche pour démarrer - resp. arrêter - l'écoute, saisir le curseur avec la souris et le positionner au minutage désiré pour écouter / réécouter le document à partir d'un endroit donné.
La seconde émission s'intitule «Arturo Benedetti Michelangeli, l'art de la perfection»:
Cliquer sur la flèche - resp. le pictogramme pause - à gauche pour démarrer - resp. arrêter - l'écoute, saisir le curseur avec la souris et le positionner au minutage désiré pour écouter / réécouter le document à partir d'un endroit donné.